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Space Frontier : L'exposition "Science et Fiction", à la cité des sciences et de l'industrie de la Villette. Chapitre VI

Lorsque sort en 1982 le film précurseur "Tron", le cyberespace est encore un concept obscure pour le grand public. Et précurseur, il le fut à plus d'un titre. Car outre les prouesses techniques du métrage (le film contient près de quinze minutes d'images numériques. Un record pour une époque où les infographistes n'utilisaient pas encore de souris!!), il est bon de rappeler que la vague littéraire ayant pour thème le Cyberespace n'a déferler dans les librairies qu'APRES 1982!
"Neuromancien",  de William Gibson, roman fondateur s'il en est, ne s'est exhibé sur les étals des libraires qu'en...1984.
Quant à "Hyperion", de Dan Simmons, autre roman incontournable sur le même thème, n'est paru qu'en...1989!
 Pour jouer au petit jeu des "Et si...", il ne fait aucun doute que SI "Tron" était sorti après la parution de "Neuromancien", son destin commercial eu t été tout autre. Car bien que les amateurs hardcore de S-F et de technologie aient accueilli chaleureusement le film dés sa sortie, ce noyau dur de spectateurs avisés n'ont pu éviter un échec financier qui mit à mal le studio Disney. Précurseur, il l'était. Au point de devancer les attentes d'un public qui venait tout juste de rentrer dans l'ère de l'informatique familial. De part sa méconnaissance en la matière, il ne sut que faire d'un film se déroulant à l'intérieur d'une machine qui à l'époque lui était encore "Terra incognita".

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Novateur dans le fond comme dans la forme,  Steven Lisberger  fit appel à la crème des designers pour concevoir l'univers électronique de son film:
Le visionnaire Syd Mead, qui aprés avoir recréer le Los Angeles de "Blade Runner" , élabora les véhicules du film (Light cycle, Light tank, Solar sailer...), le designer Peter Lloyd élabora l'environnement avant-gardiste  dans lequel évoluent les héros, tandis que la méga star de la BD Française, Jean"Moebius"Giraud, fut chargé de dessiner les costumes des personnages qui peuplent ce monde virtuel.

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C'est en 1952, que le jeune Jean Giraud, alors âgé de quatorze ans, découvre la science fiction, à travers des revues que lui a donné son père. De cette heureuse initiative de son paternel, naîtra une passion qui nourrira les deux tiers de sa carrière d'illustrateur.  
Après de brillantes années d'études artistiques, il participera à l'aventure "Pilote", revue pour laquelle il créera, avec au scénario Jean michel Charlier, le peu recommandable Lt Blueberry.
Dix ans plus tard, il quitte "Pilote" pour "L'Echo des savanes". Il y participera deux ans, avant de s'associer au projet de Jean Pierre Dionnet et Philippe Druillet, qui allait aboutir à l'édition d'un nouveau magazine, qui révolutionna le monde de la bande dessinée et de la Science fiction. 

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Concepts de costumes pour le film "Tron"

Et c'est ainsi que sort en kiosque le premier trimestre 1975 le n° 1 de "Métal hurlant". La jeune revue trouve immédiatement son public, friand de bandes dessinées de qualité. Jean Giraud, devenu l'un des illustrateurs phare du mensuel, utilisera dès lors son pseudo, Moebius (inspiré par le Mathématicien Allemand, August Ferdinand möbius), pour toutes ses illustrations à thème science fictionnel. 
Ses albums, tel que "Arzach", "Le garage hermétique", ou "Les yeux du chat", deviennent très rapidement des succès, qui dépasseront allégrement nos frontières.
Ainsi, grâce à l'originalité de ses univers fantasques et oniriques, les réalisateurs Hollywoodiens lui feront dès lors les yeux doux.

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Concepts de costumes pour le film "Tron".

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Cette coopération avec les studios de cinéma Américains ne débutent pourtant pas de façon fructueuse: Dan O'Bannon et Alejandro Jodorowsky contacte Moebius afin qu'il donne graphiquement vie, en collaboration avec H.R Giger, à leur ambitieuse adaptation du roman "Dune", de Franck Herbert. Incarnation du film maudit, le "Dune" de Jodorowsky ne verra jamais le jour (avec Salvador Dali que Jodoroswsky avait imposé dans le rôle de l'Empereur Padisha Shaddam IV, ce film aurait pu être une pure débauche de délires fantasmatiques). Malgré ce coup dans l'eau, la collaboration entre Moebius et Jodorowsky sera entérinée avec la concrétisation des six albums de la série "L'Incal".
Quelques courtes années plus tard, le scénariste Dan O'Bannon se rappellera du dessinateur Français, lorsque en 1978 débute la production de "Alien, le 8éme passager".

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Dessins conceptuels pour les costumes et combinaisons spatiales du film "Alien" de Ridley Scott.

Même si sur la quantité de croquis fournies par le Maestro,  il ne fut retenu guère plus que la combinaison spatiale à l'influence extrême orientale (dessin en noir et blanc, en haut en gauche), son talent et son style sans pareil n'était plus à démontrer.
En parallèle de sa prolifique carrière de créateur de bandes dessinées, Moebius continuera à fournir au cinéma dessins et concepts délirants issus de sa féconde imagination, à dose cependant homéopathique .

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Quelques titres auxquels Moebius participa. Tous les concepts ne furent pas retenus, comme l'extra terrestre du film "Abyss", refusé au profit d'un design de Steve Burg, qui lui donna l'aspect de raie manta qu'on lui connait.

Avant son décés, en Mars 2012, Moebius se consacrait principalement à "Moebius Production", sa maison d'édition, et aux nombreuses expositions qui lui sont consacrées un peu partout en Europe. 
Il est de coutume que de dire que nul n'est irremplaçable. Et pourtant, avec Enki Bilal et Philippe Druillet, Jean"Moebius"Giraud, faisait partie de ces illustrateurs rares, et donc précieux. Il est, et restera, une référence incontournable du 8éme art.

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L'intégralité des séquences se déroulant dans l'ordinateur contrôlé par le MCP fut filmée sur fond noir, avec une pellicule 65mm noir et blanc à fort contraste. Ce choix artistique donna un aspect unique au film, et facilita la création des innombrables caches permettant l'incrustation des décors, et des luminescences des costumes des personnages-programmes. 

 En prenant pour précepte que le monde dans lequel nous vivons est virtuel, et que le monde réel n'est que ruine où les rares humains libres sont traqués par la Matrice, "Matrix", des frères (ou soeur, on ne sait plus trop...) Wachowski, prend le total contrepied de "Tron". Et alors que ce dernier foulait un (cyber) espace encore vierge, "Matrix" bénéficiait de la culture déjà bien aguerrie de son public potentiel concernant les univers virtuels. Ainsi, le public visé se rua comme un seul homme, assurant un beau succès au film du duo. Une belle performance qui leur permirent, trois ans plus tard, de lancer dans la foulée la production de "Matrix:Relodead",et "Matrix:Revolution". 
Les Wachoski y régurgitèrent toutes leurs influences, qui allaient des films asiatiques d'arts martiaux, aux mangas en passant par les romans Cyber punks cités plus haut, le tout dans un maelstrom d'effets spéciaux soutenant un scénar à forte résonance biblique et mythologique.

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Et comme l'univers virtuel représenté dans "matrix" est en tout point semblable au notre, point de personnage en costume moule burnes irradiant d'une luminescence bleu ou rouge. Ici, les héros sont "top fashion". Car quitte à être dans un monde virtuel, autant avoir la "cyber classe"!
Kym Barrett, costume designer de la trilogie (dont nous touchons deux mots juste là!), su traduire la personnalité des héros par leurs atours : Morpheus cache son sous long pardessus de cuir noir, un ensemble violet. Dans le langage des couleurs, le violet représente la paix, l'amitié, la méditation. Il est aussi la couleur des habits des évêques.
Morpheus, en révélant à Neo la teneur du monde réel, et en l'initiant à la mission qui l'attend, devient son plus indéfectible allié.  Et s'il n'était pas mort avant que Neo n'acquiert son statut de Messie, il aurait été, sans l'ombre d'un doute, l'autorité le représentant, son évêque!

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L'interprétation des costumes revêtus par Trinity (Carrie Ann Moss) et Neo (Keanu Reeves) sont bien plus aisés : Dans les trois films de la série, Trinity porte des vêtements en cuir noir. Vestes cintrées, blousons tout aussi cintrés, bustiers, pantalons moulants... Ces apparats en font une Walkyrie sexy, farouche et impitoyable combattante, qui sait aussi être à l'occasion une chaleureuse "repos du guerrier".
Quant à Neo, sa soutane parle d'elle même. Il est à la fois  missionnaire et sauveur.  Et comme tel, il se sacrifiera.
Quant aux lunettes noires portées par les principaux personnages, outre le fait qu'elles apportent un incontestable plus esthétique, elles permettent également de cacher les clignements d'yeux des acteurs lorsque ils utilisent des armes à feu. Des acteurs clignants des yeux à la première douille qui vole, ça décrédibilise un peu les fiers combattants de la liberté et la vérité qu'ils représentent le temps d'un film. 

Les cités constituées de codes, de programmes et d'octets cédent la place à celles toutes de métals, de béton et de silice. Des cités composants des sociétés bien trop parfaites pour être honnêtes.
Utopie, contre utopie, et sociétés supposées idéales : On s'y téléporte en cliquant juste LA.



26/04/2011
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